lundi 31 août 2009

Inflation : l'économiste de la Société Générale

Une récente interview de l'économiste en chef de la Société Générale valide bien cette idée de retour de l'inflation, retour qui est accueilli plutôt froidement, alors qu'il règlerait ce léger problème de dette, publique comme privée. De façon intéressante, elle confirme l'attitude orthodoxe anti-inflationniste à attendre de la banque centrale, même si celle-ci aura à choisir entre croissance et inflation si celle-ci démarre avant que la croissance ne soit véritablement repartie.

La vraie question est plutôt : que se passera-t-il sans inflation ? La continuation de l'endettement public jusqu'à un krach ? Les trois autres possibilités que le krach semblent difficiles à soutenir : une croissance économique longue et soutenue qui permette de réduire le poids des dettes et d'équilibrer le budget, une hausse des impôts ou une réduction des dépenses publiques pour obtenir le même résultat. La dernière solution est impraticable, puisqu'elle créerait une récession qui ne permettrait pas de réduire le déficit ni de rembourser les dettes, reste la solution de la croissance économique ou celle des impôts.

Cette solution de croissance économique est évidemment la meilleure théoriquement, mais aussi la plus difficile à croire. D'où viendra cette croissance économique capable de résorber le déficit, quand le déficit qui caractérise les pays développés est avant tout un déficit ayant pour but de soutenir la consommation, éminemment nécessaire à la croissance. Le démarrage réel de la consommation des pays asiatiques, tant attendue, ne risque pas d'impacter fortement les industries des pays développés, puisque leur production intérieure leur permettra de répondre à leurs besoins sans autre problème que la gestion d'un afflux suffisant de matières premières.

La dernière solution est d'augmenter fortement les impôts (en particulier des classes les plus riches) pour rééquilibrer le budget de l'Etat tout en réduisant drastiquement l'épargne. C'est malheureusement une option impossible politiquement, la démocratie moderne et l'idéologie capitaliste ne pouvant accepter une telle solution.

A bientôt,

samedi 22 août 2009

Richesse : objet des banques centrales

De cette relation entre richesse et production, deux conclusions importantes peuvent en être tirées pour les banques centrales. La première, que le taux d'intérêt ne fait pas tout dans la mesure de la richesse (et dans son inflation), et donc que le taux de croissance de la production est très important lui aussi. La deuxième est que les banques centrales, focalisées sur la monnaie, en oublient le véritable concept, la richesse.

La monnaie n'est qu'une composante de la richesse, assez limitée en réalité, puisque la valeur des actifs immobiliers, fonciers, boursiers, est largement plus importante que la valeur de la monnaie en tant que telle, sans parler des dettes qui peuvent s'ajouter à ces actifs. C'est d'ailleurs le problème des aggrégats de monnaie, qui ne disent pas grand-chose puisqu'ils sont difficiles à isoler et à calculer dès que l'on entre sur des outils financiers sophistiqués. Le message est donc le suivant : les banques centrales doivent se focaliser sur la richesse, non sur la monnaie, car il est trop facile de déguiser de l'inflation par des bulles d'actifs, sans modification importante de la masse monétaire. C'est le rapport richesse/production qui doit être scruté, évalué, afin de ne pas faire déraper significativement ces deux grandeurs, qui sont les responsables de l'équilibre économique.

Nous arrivons ici à la définition qui semble la plus cohérente intellectuellement de l'inflation : une hausse de la valeur de la production par rapport à la valeur de la richesse. Ou relativement parlant, puisque la notion de prix est une balance à deux plateaux, une diminution de la valeur de la richesse par rapport à la production. L'inflation entérine une perte de valeur de la richesse, mais n'a en fait jamais réellement lieu à long terme, puisque la richesse retrouve son niveau d'équilibre avec la production. Il y a simplement eu transfert de valeur entre les différents actifs qui constituent la richesse.

Ce que l'on nomme habituellement inflation est donc une inflation monétaire, une diminution de la valeur d'un actif papier qui s'appelle monnaie, au profit de la production évidemment et au profit des autres actifs (en particulier productifs) qui vont eux gagner de la valeur relativement à la monnaie. Si l'on rendait liquides tous les actifs, le transfert de valeur entre monnaie et autres actifs (l'inflation monétaire) serait sans conséquence, puisque le rééquilibrage se ferait facilement, rapidement, sans blocage ni diminution de la demande de biens produits. Mais ce n'est pas le cas, et c'est pourquoi la monnaie, instrument d'échange, a un rôle si particulier dans l'économie.

A bientôt,

mardi 18 août 2009

Richesse et Production

Le lien entre richesse et production est en réalité un lien temporel, entre le présent, la production, et le futur, constituant la richesse. D'un point de vue macroéconomique, la richesse est l'actualisation de la production globale. En prononçant le mot actualisation, deux autres paramètres apparaissent, le premier étant le taux de croissance future de la production, et le second le taux d'intérêt directeur. Nous avons donc une équation reliant production et richesse qui intègre le taux de croissance de la production et le taux d'intérêt. Déterminer la richesse revient donc à estimer la croissance de la production sur le long terme et la variation du taux d'intérêt dans le futur.

Si l'on considère que la production est le déterminant essentiel de la richesse, la richesse doit varier avec elle, et effectivement celle-ci varie avec la croissance présumée de la production. Les variations de la bourse et du prix des autres actifs (immobiliers, fonciers...) se font donc généralement en fonction de l'évolution de la production (et du taux d'intérêt). Cependant de larges variations, corrélations et transferts de valeur entre les différentes classes d'actifs ont lieu, en particulier entre immobilier et actions. Les corrections des prévisions de croissance et les variations de taux d'intérêt contribuent à rendre encore plus difficile la détermination de la richesse globale normale. Cette difficulté, et la capacité de création monétaire des banques qui favorise l'endettement, rend possible et souvent réel une surévaluation de la richesse, une bulle globale.

Récemment, une bulle marquée est apparue au niveau immobilier, et a provoqué une récession globale quand elle a explosé, récession heureusement stoppée par le recours à l'endettement public, qui a pris la relève de l'endettement privé. L'économie peut donc repartir, après une correction sévère de la richesse immobilière, réduction en partie transférée en dette publique (dette qui va poser problème dans le futur). La richesse peut donc être un puissant facteur influant sur la production et créant croissance ou récession.

A bientôt,

mardi 11 août 2009

Un nouvel objectif pour les banques centrales

Le message précédent a donc mis à jour un problème majeur du crédit bancaire : le crédit est plus orienté vers la spéculation sur les actifs que vers le financement de la production, des investissements des entreprises. C'est donc une véritable gageure avec la stratégie de taux d'intérêt que de maîtriser le volume de crédit pour éviter de donner lieu à une spéculation sur les actifs grâce à l'endettement, tout en maintenant un volume de crédit suffisant aux entreprises productives. En effet, comme le crédit se dirige spontanément et principalement vers ce qui est le plus rémunérateur, il ira toujours vers la spéculation, où le gain est d'autant plus rapide qu'il est élevé (même si ce n'est pas dans la durée), plutôt que vers la production.

Nous revenons là au défaut principal de la stratégie de variation du taux d'intérêt. Si la variation du taux d'intérêt n'a que peu d'impact sur les cycles économiques réels (donc hormis les prix des actifs, par exemple immobilier ou bourse), que cela ne sert qu'à accompagner la croissance ou reproduire les effets financiers de l'inflation, alors la variation du taux d'intérêt et donc du volume de crédit doit servir exclusivement à contenir les prix des actifs. Nous avons là une redéfinition intéressante des objectifs de la banque centrale : elle ne doit pas tenir compte de la croissance de la production ou de sa récession, qui sont largement indépendantes de sa stratégie, mais au contraire se focaliser sur les prix des actifs (et non sur l'inflation de la production par rapport à la monnaie, une classe d'actifs parmi d'autres). Elle doit donc avoir pour objectif de maîtriser le volume de crédit pour éviter que le prix d'une classe d'actifs devienne trop élevée par rapport à la normale. Mais il reste à définir ce qu'est "la normale", ce qui passe par une définition de la richesse.

A bientôt,

dimanche 9 août 2009

Inflation de production et Inflation d'actifs

Les banques centrales ont renoncé depuis longtemps à contrôler directement l'émission de monnaie, émission qu'elles ont laissé aux banques privées, conservant cependant la variation des taux d'intérêt comme outil indirect. Depuis ce moment, la création de monnaie est interprétée de façon très étonnante par les banques centrales. En effet, les banques centrales sont censées réagir à l'inflation mais laissent filer considérablement la masse monétaire, source s'il en est d'inflation. C'est donc une attitude plus qu'étonnante de leur part que nous observons. Mais tout dépend de quelle inflation on parle.

Là semble se trouver l'astuce, sur la différence entre l'inflation des prix de produits, et l'inflation du prix des actifs. Que la masse monétaire croisse et crée des bulles d'actifs, la banque centrale laisse faire, mais que la masse monétaire croisse et crée une inflation de production, là elle intervient. La logique est faible, mais en résumé, si les prix du supermarché augmentent, ce n'est pas bien et il faut y remédier, si le prix de l'immobilier et le prix des actions augmentent, il est possible de laisser faire. Sauf que s'acheter un logement a un tout autre poids que d'acheter une salade, et que le prix du logement aura une incidence bien plus importante que le prix de la salade. Les banques centrales seraient donc plutôt schizophrènes en séparant ainsi les deux types d'inflation, oubliant par la même que les dernières crises économiques sont venues de la sphère financière.

Pour éviter ce problème, il semble que le focus doive être repositionner sur les actifs plutôt que sur la production (je reviendrai en détail sur le lien entre actifs, ou richesse, et production). Il serait sûrement beaucoup plus intéressant et efficace pour les banques centrales de maîtriser l'inflation sur les actifs, qui semble toujours être en avance sur l'inflation sur les produits, que celle sur les produits. Ainsi, les banques centrales pourraient se concentrer sur la régulation de la masse monétaire, avec pour base l'inflation des actifs, qui permettrait d'éviter les bulles et krachs financiers, tout en laissant les prix de la production s'adapter entre eux pour refléter l'évolution des coûts. Et comme l'inflation des actifs précède celle de la production, si l'inflation des actifs est contenue, celle de la production le sera aussi...

A bientôt,

mardi 4 août 2009

Stratégie des banques centrales (bis)

La stratégie des banques centrales souffre de deux défauts importants, liés à l'approche monétaire mise en oeuvre. Ces deux défauts sont fréquemment mis en avant pour critiquer l'utilité réelle de la variation des taux d'intérêt, et donc de la stratégie des banques centrales.

Le 1er défaut est celui du postulat de la présence continue de crédit, quelles que soient les conditions économiques. Le cas des subprimes en est l'exemple le plus récent, où ce n'est pas le taux mais le volume de crédit qui posait problème. Même avec un taux d'intérêt très faible, la diminution drastique du volume de crédit prêté par les banques a été le vrai problème, qui n'a pu être résolu que par l'injection massive de liquidités par la Fed, la banque centrale américaine, puis par les autres banques centrales. La stratégie des taux d'intérêt à donc un premier défaut majeur, celui de ne pas répondre aux circonstances de 'credit crunch'.

Le 2ème défaut se porte, lui, de l'autre côté du marché du crédit, du côté des entreprises et des particuliers. L'emprunt par les entreprises et les particuliers dépend en effet beaucoup plus de la conjoncture économique et des perspectives (croissance de la demande, faible risque de chômage, etc) que du taux d'intérêt. Même un taux d'intérêt très bas dans une économie en récession ne peut changer l'approche prudente des entreprises et des particuliers, et donc relancer la demande globale.

Voilà donc les 2 défauts majeurs de l'approche actuelle des banques centrales. Il est indéniable que la baisse des taux d'intérêt peut aider à la reprise économique en permettant plus facilement l'endettement des entreprises et des ménages, mais cette baisse ne peut pas déclencher la reprise, seulement l'accompagner. Il est indéniable que la hausse des taux d'intérêt peut diminuer l'inflation en renchérissant le coût du crédit, mais seulement si le taux d'intérêt dépasse les attentes de croissance économique des acteurs, et au prix d'une baisse de la croissance future.

En conclusion, la variation des taux d'intérêt est loin d'être la panacée pour la croissance économique, et plus étonnament, même pour l'inflation (dans sa composante monétaire). Nous y reviendrons.

A bientôt,

dimanche 2 août 2009

Actualités : 1500 milliards

La dette publique française a passé le cap des 1400 milliards de dette publique brute (critères de Maastricht) au 1er trimestre 2009, et passera sans coup férir le cap des 1500 milliards en 2009. Selon les critères de l'Insee pour la dette, ce montant est encore plus important, de l'ordre de 1800 milliards environ. Une étude récente du FMI prévoit d'ailleurs le poids de la dette française à plus de 90 % du PIB dès 2012, ce qui laisse augurer du pire, au vu de l'optimisme habituel des prévisions.

Un point intéressant pour le cas français est que de plus en plus de dette publique est indexée sur l'inflation, ce qui a un petit avantage et un énorme inconvénient. Le petit avantage est d'éviter la prime de risque d'inflation sur les emprunts à long terme de l'Etat, donc de diminuer sur le court terme les taux d'intérêts à payer. L'énorme inconvénient est d'empêcher le remboursement de la dette publique par l'inflation (ce qui empêche de payer en monnaie dévaluée sa dette). Pour éviter un embarras présent, l'Etat est en train de choisir une solution qui le mettra dans l'impossibilité d'utiliser l'inflation pour rembourser sa dette, mais celle-ci doit lui être imposée par les investisseurs qui redoutent l'inflation. Il ne lui restera que la faillite, si l'inflation apparaît. A moins de ne pas respecter ses engagements, ou de relever encore plus les prélèvements obligatoires...

Le transfert de la dette privée vers la dette publique issu des subprimes s'est peu réalisé en France, puisque l'Etat était historiquement déjà très endetté, et les individus beaucoup moins, à l'inverse des pays anglo-saxons. La crise des subprimes a donc été bien moins violente pour le système bancaire français, et l'économie française dans son ensemble. Mais si le remboursement de la dette publique reste impossible dans le futur par le moyen de l'inflation, c'est le phénomène inverse qui se produira, un transfert de la dette publique vers la dette privée, par des impôts très lourds. Ou bien, la faillite de l'Etat, et un krach économique...

A bientôt,

La stratégie des banques centrales

Les banques centrales ont adopté depuis bientôt 30 ans une approche de variation des taux pour essayer de contrôler l'économie dans son ensemble, et répondre à leur objectif de croissance sans inflation. L'idée est assez simple : des taux d'intérêts élevés vont faire diminuer l'inflation (baisse de la demande de crédits) et des taux bas vont relancer l'économie (un crédit abondant et peu cher relance la consommation et l'investissement). Le calcul sera donc le suivant : des variations appropriées des taux d'intérêt doivent permettre d'approcher au plus près leur objectif de croissance sans inflation.

Deux problèmes apparaissent ici : le premier est la variation continuelle des taux d'intérêt, véritable effet yo-yo pour la croissance économique, avec son cortège d'anticipations et de corrections. La création et l'explosion récurrente de bulles spéculatives sur les actifs est en partie issue de cette fixation volontaire des taux d'intérêts. Le deuxième est encore plus intéressant : relever les taux d'intérêt quand l'inflation commence revient à reproduire l'impact de l'inflation sur le marché de l'argent. Pour éviter l'inflation, les banques centrales reproduisent l'effet de l'inflation sur le crédit. L'effet régulateur de l'inflation est donc mimé, sans que l'inflation en tant que telle soit installée. Quel est donc l'intérêt de reproduire les effets sans la cause ? Le relèvement des taux d'intérêts diminue la croissance en même temps que l'inflation. En quoi cela est-il préférable à l'inflation, qui aboutirait à ce relèvement d'elle-même ? Il semble qu'il y ait là un choix idéologique bien plus qu'une analyse rationnelle des enjeux : entre inflation et croissance, l'inflation a gagné, et domine le débat. Pourquoi cette prise de position ?

A bientôt,