mardi 28 décembre 2010

Redistrbution de productivité

Pour continuer dans le sens du précédent post, la redistribution est un facteur beaucoup plus puissant que le simple soutien keynésien à la demande. La redistribution est un facteur de productivité. En séparant la consommation du simple facteur travail, elle permet des gains de productivité que le lien direct travail-consommation ne permettrait pas.

Considérons un instant une économie sans redistribution : le seul soutien à la consommation provient du travail. Quand les gains de productivité se définissent par une diminution du travail, comme cela est souvent le cas dans une économie capitaliste, alors surgit un véritable cercle vicieux : les gains de productivité engendrent une diminution du travail, qui entraîne par là une baisse de la consommation et des craintes favorisant l'épargne de précaution de la part des ménages. Les gains de productivité favorisent donc une récession larvée, compensée seulement par un endettement élevé, insoutenable à terme. Dans une économie sans redistribution, les gains de productivité finissent donc par une diminution de la consommation.

Considérons maintenant l'excès inverse : une économie où la redistribution fournit la totalité de la consommation. Même si des problèmes majeurs de motivation du travail apparaissent dans ce système, les gains de productivité deviennent beaucoup moins problématiques, puisqu'ils ne viennent pas amputer la consommation de façon importante. Ainsi une redistribution élevée permet à l'économie d'engendrer des gains de productivité sans déprimer la croissance trop fortement. Bien sûr, cette redistribution est basée sur la valeur ajoutée bien plus que sur une taxation des salaires.

Entre ces deux extrêmes, une solution plus médiane existe, où le travail est un fournisseur de revenus supplémentaires, mais où la redistribution encourage les gains de productivité en ne diminuant pas la consommation pour autant. En examinant les évolutions du nombre de travailleurs dans la population totale, le schéma apparaît clairement dans les pays développés : de plus en plus de production avec de moins en moins de travailleurs par rapport à la population totale (retraités, chômeurs, étudiants sont de plus en plus nombreux). Ainsi, il serait temps de reconsidérer la redistribution, en la considérant comme un facteur nécessaire pour les gains de productivité, plutôt que comme une charge empêchant les ajustements économiques violents exigés par les capitalistes les plus extrêmes. Même si le marché parfait permet en théorie ces ajustements, la réalité se porte beaucoup plus en faveur de la redistribution, pour déclencher des gains de productivité qui sont la source même de la croissance économique.

En conclusion, la redistribution est bonne pour la croissance, la redistribution est source de productivité.

lundi 27 décembre 2010

Une (très) bonne nouvelle

Une fois n'est pas coutume, ce blog héberge une note d'espoir. La raison en est simple : la réflexion autour d'une protection sociale mondiale avance ! Le FMI, l'ONU et certains économistes renommés ont commencé à soutenir cette idée, non pas sur des considérations morales qui mériteraient en eux-mêmes d'étudier le sujet, mais sur des considérations économiques. Et pour cela, il faut remercier Lula.

Lula a montré au monde qu'en instaurant une protection sociale pour les plus démunis, il permettait de créer une croissance de la demande interne durable, moteur d'un développement positif pour tout un pays. Bien sûr, cette protection doit être bien pensée, afin qu'elle ne parte pas en exportations et ruine le pays qui la met en place, mais les besoins premiers d'un pays pauvre vont souvent à des biens de première nécessité, fournis par l'économie nationale. Ainsi, la redistribution vers les couches les plus basses est une stratégie de soutien de la demande très intéressante, car les pauvres consomment le peu d'argent qu'ils ont beaucoup plus qu'ils ne l'épargnent.

Donc, pour relancer une économie mondiale défaillante, l'idée est simple : recopier la tactique Lula. Et par la même occasion, sortir quelques centaines de millions de personnes de la misère... Autant dire que l'idée est bonne, car elle rejoint le diagnostic de surépargne qui gangrène l'économie mondiale, provoquant une grave crise d'endettement public. Rétablir l'équilibre entre consommation et épargne passe par une redistribution des revenus, et par l'acceptation que le marché capitaliste ne permet pas à lui tout seul de rééquilibrer naturellement l'économie, surtout quand des stratégies de protectionnisme monétaire sont à l'oeuvre. En définitive, le creusement des inégalités, défendu par les capitalistes comme une nécessité pour la croissance économique, se révèle au contraire une limite majeure à la croissance de l'économie, car celles-ci créent des bulles d'endettement insoutenables à terme. Et le monde, qui sort à peine de l'éclatement d'une bulle immobilière, va bientôt vivre l'explosion de la suivante, bien plus grosse, celle de la dette publique...

vendredi 24 décembre 2010

Le triple A de la France

Voilà une annonce étonnante en ces temps de dégradation des notes européennes : Standard & Poor's confirme la note AAA de la France ! Mouvement très étrange au demeurant, quand on connaît la situation française (7,7 % de déficit et une dette de plus de 80 % du PIB). Cette annonce semble destinée aux investisseurs, avec pour but inavoué de conserver un niveau élevé pour l'euro. Car si la France en venait à être dégradée, nul doute que l'euro s'effondrerait, ce qui ne ferait pas les affaires des USA et de la Chine en particulier. Il est donc préférable de maintenir l'illusion le plus longtemps possible, afin que la compétitivité européenne reste défaillante, permettant aux américains et aux chinois de relancer leur propre machine économique.

Le jour où la Chine comprendra qu'elle a aujourd'hui plus intérêt à réévaluer sa monnaie pour profiter de matières premières moins chères, qu'à la conserver sous-évaluée, la situation évoluera favorablement. Mais elle ne semble pas prête à faire ce mouvement rapidement, entraînant le monde et en particulier l'Europe dans une grave crise d'endettement public...

vendredi 17 décembre 2010

La crise continue

Les dernières semaines ont été finalement tranquilles, avec de nouvelles étapes attendues vers la crise de la dette publique européenne : la dégradation des notes des pays les plus exposés (l'Irlande de 5 crans par Moody's !, la Grèce encore une fois, et même la Belgique maintenant), le sauvetage de l'Irlande par un prêt du FESF de 25 milliards, les craintes sur le Portugal et l'Espagne, et une renégociation de la dette grecque par le FMI et l'Union Européenne.

Ce qui paraît irréel est que malgré ces alertes de plus en plus marquées sur la situation de l'économie européenne, l'euro ne soit pas encore descendu à des niveaux abyssaux. Bien sûr, ce n'est aucunement l'intérêt des autres pays mais l'euro devrait logiquement s'effondrer quand on voit la BCE se préparer par une augmentation de capital à absorber des centaines de milliards de dette publique européenne, à monétiser la dette publique. Le déclic devrait arriver quand la France et de l'Italie seront elles aussi dans des situations de plus en plus désespérées...

Voici donc la suite logique : plans de rigueur inefficaces dans les pays les plus exposés à une crise de leur dette publique, continuation des déficits et interventions accrues de la BCE pour soutenir les emprunts souverains, jusqu'à ce que l'effondrement de l'euro amène une inflation importée (énergie et matières premières) qui permettra de rééquilibrer les budgets par l'effacement des dettes publiques. Une grande vague d'inflation, il n'y a rien de mieux pour effacer de la dette publique, qui de toute façon ne pourra jamais être remboursée...